La servante écarlate

Source
  • Roman SF
Référence The Handmaid’s Tale, de Margaret Atwood (1985)
Contexte L’histoire prend place dans un univers dystopique où la société américaine a cessé de suivre un fonctionnement démocratique, mais est structurée par un système de caste. Nous suivons l’histoire à-travers les yeux d’une narrateur qui nous amène progressivement à comprendre que ce nouveau fonctionnement de la société résulte d’un phénomène démographique : une chute de la natalité.
Traits démographiques En fait, cette nouvelle forme de société s’est progressivement mise en place en réponse à la chute de la fécondité des femmes, chute due à la pollution et à la toxicité de l’air. Pour éviter un pur et simple effondrement de la société, les dirigeants ont plus ou moins asservi les femmes afin de prendre le contrôle sur leur sexualité pour avoir un contrôle total sur la gestion de la natalité. La société organise et planifie l’acte de reproduction des femmes fertiles (de la caste des “Servantes”) avec certains hommes plus ou moins désignés par les dirigeants (souvent les dirigeants eux-mêmes, de la caste des “Commandants”).
Commentaires La construction du récit et sa mise en place sont intéressantes, en ce qu’elles partent d’un phénomène démographique qui n’est pas seulement imaginé, mais que l’on commence déjà à observer depuis quelques années dans les pays Occidentaux, la baisse de la natalité. Dans notre monde, cette baisse n’est pas tant due à une chute de la fécondité des femmes (comme dans le livre) qu’à l’évolution de notre modèle de société. Concrètement, ce n’est pas tant que les femmes ne peuvent plus avoir d’enfants qu’elles veulent surtout moins avoir d’enfants. Mais peu importe la raison de cette chute de la natalité, on est de toute façon dans les deux cas dans une crise démographique centrale.

Dans l’histoire de la servante écarlate, ce nouveau modèle de société s’est mis en place de manière plus ou moins démocratique, suite à la montée en puissance d’un parti profondément religieux. Là encore, l’idée n’est pas absurde : le lien entre la natalité et la “religiosité” d’une société peut tout à fait être dressé. En effet, les religions “traditionnelles” ont toujours été de ferventes défenseuses d’un modèle de société structuré autour de la famille et des enfants, en encourageant le mariage et en décourageant le divorce ou encore en s’opposant à l’utilisation de méthodes de contraception. Qu’un recul de la religion dans une société puisse s’accompagner d’une baisse de la
natalité est très cohérent, et on peut donc légitimement imaginer que faire progresser une religion “traditionnelle” dans un pays est une manière de remonter la natalité.

Finalement, la servante écarlate intéresse par le réalisme et la cohérence de ses présupposés et de sa construction. La chute de la fécondité est un phénomène encore minoritaire aujourd’hui, mais qui est sans doute amené à prendre de l’ampleur dans les années à venir. La chute de la natalité est déjà observée dans une majeure partie des pays Occidentaux, même si à différentes échelles. Et la “réponse” à cette crise par un retour de la religion est crédible, et intéressante d’un point de vue démographique et sociologique.

Cette oeuvre est certes une oeuvre de fiction, elle n’en est pas moins construite sur des faits scientifiques avérés (qui ne l’étaient même pas forcément encore à l’époque, d’où en plus un côté visionnaire remarquable) et la cohérence tout au long de sa construction en fait une oeuvre spécialement intéressante, à lire ou à regarder.
Mon nom Valentin HOAREAU