Les parcs agroforestiers à frêne dimorphe des Aït M’hamed (Haut Atlas central)
Les parcs agroforestiers à frêne dimorphe des Aït M’hamed (Haut Atlas central)
Sous-titre
Une spécificité locale bien gardée
Auteur.e.s
NumerosImpromptus
- #05
Résumé
Les parcs agroforestiers à frêne dimorphe (Fraxinus dimorpha) constituent des peuplements clairs spontanés assez rares dans l’Atlas marocain. Cet arbre endémique fournit un bois à la fois solide et souple, pour la fabrication des toits des maisons (poutres et perches), surtout un fourrage de qualité en automne. Dans la zone d’Aït M’Hamed (Haut Atlas central), ces peuplements sont régulièrement taillés selon des cycles très précis : pour un même arbre, exploitation en trognes tous les 4 ans ; puis conservation de certaines tiges bien droites pour être exploitées lors du cycle suivant (8 ans) comme perches, ou bien laissées encore pour qu’elles deviennent poutres. De même, les arbres surpâturés sont protégés par la construction de murets de pierres pour les préserver de la dent du bétail (« tahboucht » en Berbère). Les jeunes repousses sont alors sélectionnées et liées entre elles afin de s’anastomoser au cours du temps pour ne former qu’un seul gros tronc. Cette technique traditionnelle permet d’obtenir une augmentation de la productivité en feuilles fourragères de 31 % , par rapport à un arbre non anastomosé. Il s’ensuit la formation de paysages culturels singuliers. Cette spécificité relève à la fois de la matérialité (paysages, ressources arborées particulières) et de l’immatérialité (accumulation de savoirs et pratiques singulières, patrimoine culturel et technique), avec un ancrage territorial évident. Cependant, on se trouve ici dans un cas de construction de spécificités locales PAR et POUR une société locale, sans forcément une volonté formelle de spécification, mais qui a pour fonction première de répondre à des besoins locaux, et de participer à la résilience du système socio-écologique en soi.
Abstract
The dimorphic ash (Fraxinus dimorpha) agroforestry parks are spontaneous, open stands that are quite rare in the Moroccan Atlas. This endemic tree provides both solid and flexible wood for the manufacture of house roofs (beams and poles), and an especially high-quality forage in autumn. In the Aït M’Hamed area (Central High Atlas), these stands are regularly pruned according to very precise cycles: for a same individual tree, pollarding every 4 years; and conservation of some very straight stems to be exploited during the next cycle (8 years) as poles, or left again so that they become beams. Another remarkable practice concerns the construction of low stone walls to protect overgrazed trees from the teeth of livestock («tahboucht» in Berber). The young regrowths are then selected and linked together to anastomose over time and constitute a single trunk. This traditional technique results in a 31% increase in forage leaf productivity compared to a non-anastomosed tree. This results in the formation of particular and functional cultural landscapes. This specificity is both material (landscapes, particular tree resources) and immaterial (accumulation of singular knowledge and practices, cultural and technical heritage), with an obvious territorial anchoring. However, we are here in a case of the construction of local specificities BY and FOR a local society, without necessarily a formal desire for specification, but whose primary function is to respond to local needs, and to participate in the resilience of the socio-ecological system in itself.
Année de publication
2019
Discipline
- Ecologie
- Agronomie
Fichier : LesParcsAgroforestiersAFreneDimorpheDesA_file_1607696204078_impromptus-5-1-r.pdf
Télécharger
Valorisation du zgougou (graines de pin d’Alep) dans le Haut Tell tunisien
Valorisation du zgougou (graines de pin d’Alep) dans le Haut Tell tunisien
Sous-titre
Communautés collectrices et ancrage territorial
Auteur.e.s
NumerosImpromptus
- #05
Résumé
Le développement récent de l’utilisation des graines du pin d’Alep, connu sous le nom du « zgougou », constitue un enjeu important pour la paysannerie tellienne (Tunisie centrale). L’absence de savoir-faire et d’expérience dans la majorité des autres forêts du Haut Tell que celles de la région de Makthar a abouti à des innovations dans les techniques d’exploitation mises en oeuvre par les communautés locales. De même, la surexploitation de la pinède de Kessra a incité les acteurs de la Commune d’Ouled Mrabet à s’organiser pour s’orienter vers l’exploration d’autres pinèdes. Leur interaction avec les communautés des forêts sous-exploitées a créé une certaine concurrence, qui a nécessité d’établir plusieurs formes de compromis avec les populations autochtones. L’absence
d’opportunités d’amélioration de revenus et l’absence d’embauches économiques dans la paysannerie ont affaibli l’ancrage à leur territoire des exploitants les plus expérimentés. Mais le recours inévitable aux avances auprès des commerçants et intermédiaires a cependant induit une structure compliquée d’exploitation et de commercialisation, entrainant des dépendances rarement en faveur des exploitants du zgougou. La commercialisation du produit et ses circuits de distribution sont encore discrets dans un contexte récent d’augmentation de la demande liée à son introduction dans l’industrie agroalimentaire et à l’extension de ses usages. Néanmoins, les reboisements étatiques réalisés à partir des années 1960, arrivés à maturité, offrent à la paysannerie tellienne des opportunités d’amélioration de leurs revenus grâce à l’exploitation du zgougou et permettent
d’envisager une espèce de symbiose entre les communautés forestières et les pinèdes si celles-ci sont gérées dans une optique de durabilité des ressources.
d’opportunités d’amélioration de revenus et l’absence d’embauches économiques dans la paysannerie ont affaibli l’ancrage à leur territoire des exploitants les plus expérimentés. Mais le recours inévitable aux avances auprès des commerçants et intermédiaires a cependant induit une structure compliquée d’exploitation et de commercialisation, entrainant des dépendances rarement en faveur des exploitants du zgougou. La commercialisation du produit et ses circuits de distribution sont encore discrets dans un contexte récent d’augmentation de la demande liée à son introduction dans l’industrie agroalimentaire et à l’extension de ses usages. Néanmoins, les reboisements étatiques réalisés à partir des années 1960, arrivés à maturité, offrent à la paysannerie tellienne des opportunités d’amélioration de leurs revenus grâce à l’exploitation du zgougou et permettent
d’envisager une espèce de symbiose entre les communautés forestières et les pinèdes si celles-ci sont gérées dans une optique de durabilité des ressources.
Abstract
The recent development of Aleppo pine seeds named “zgoogoo”, represents an important challenge for the rural population of the tunisian High Tell. Its exploitation, limited for a long time to the forests surrounding Makthar, now concerns other forests as well. In the absence of knowledge or previous experience, local communities have innovated, with specific exploitation techniques.However, the overexploitation of Kessra’s pinewood has incited zgoogoo pickers from Ouled Mrabet to migrate to underexploited forests further away, where they found themselves in competition with local pickers. They had to compromise in various ways. The absence of other economic income raising opportunities weakened the territorial anchorage of the most experimented communities in favor of a specialization in zgoogoo exploitation. The loans given by zgoogoo traders, later remunerated by the product, built a complex structure of exploitation and
commercialization, rarely to the advantage of the pickers. The commercialization of zgoogoo and its paths of distribution are still discreet in a new context which is characterized by a rising demand related to the introduction of this product in the agro business industry by multinational firms and to the extension of its uses. When reaching maturity, the plantations offer a wealth of
zgoogoo, which has relatively ameliorated the incomes of the population and consequently has lead to a symbiosis between forests’ communities and pinewoods, that is when resources are managed in a sustainable way.
commercialization, rarely to the advantage of the pickers. The commercialization of zgoogoo and its paths of distribution are still discreet in a new context which is characterized by a rising demand related to the introduction of this product in the agro business industry by multinational firms and to the extension of its uses. When reaching maturity, the plantations offer a wealth of
zgoogoo, which has relatively ameliorated the incomes of the population and consequently has lead to a symbiosis between forests’ communities and pinewoods, that is when resources are managed in a sustainable way.
Année de publication
2019
Discipline
- Géographie
- Anthropologie
- Ecologie
- Agronomie
Fichier : ValorisationDuZgougouGrainesDePinDalep_file_1607696204078_impromptus-5-2-r.pdf
Télécharger
Le terroir dans tous ses états
Le terroir dans tous ses états
Sous-titre
Entre paradigme discursif et fragmentation des conceptions
Auteur.e.s
NumerosImpromptus
- #01
Résumé
Si l’on fait dire au terroir beaucoup de choses, teintées souvent de bienveillance, il est plutôt un mot valise qui recouvre une pluralité de situations, d’acteurs et de logiques. Tout en étant une réalité fragmentée, tant au niveau des savoirs et que des réalités empiriques, l’adoption d’une définition du terroir par l’UNESCO en 2005 participe d’un processus de normalisation à vocation internationale. Ce chapitre propose ainsi une approche critique de l’émergence du concept à la lumière de son histoire à la fois scientifique, professionnelle et politique. Sa reconnaissance institutionnelle internationale au travers d’une définition dont l’ « opérationnalisation locale » vient traduire des formes d’hybridation de la notion est discutée. Cette cohésion conceptuelle se heurte à des réalités empiriques plurielles où les réappropriations du concept opérées localement ne correspondent pas nécessairement au modèle tel qu’il avait été envisagé. Considérer le terroir comme un paradigme permet de faire un examen critique de ses soubassements épistémologiques et idéologiques. Les quelques pistes ici formulées soulignent dès lors une conception occidentalo-centrée, elle-même aux prises d’une idéologie du développement durable intégrée dans les mailles du capitalisme.
Abstract
The multiple uses of the concept of « terroir » – often benevolent – reveal the heterogeneity of situations, actors and logics linked to it. As a fragmented reality, it implies a variety of knowledges and empirical realities, but in 2005, UNESCO adopted a new definition of the concept of terroir as a part of a process of international normalization. This chapter offers a critical approach of the emergence of this concept by means of its scientific, politic and professional history. Its international and institutional recognition through a definition, whose local operationalization translates into forms of hybridization of the notion, is here discussed. because this conceptual cohesion faces numerous empirical realities in which local reappropriations do not necessarily match with the original model, considering the terroir as a paradigm allows a critical examination of its epistemological and ideological significations. The few perspectives described in this article show the influence of an occidental conception, embedded in ideology of sustainable development,accommodated in the capitalist economy.
Année de publication
2016
Discipline
- Anthropologie
- Sociologie
- Agronomie
Fichier : LeTerroirDansTousSesEtats_file_1607696204078_impromptus-1-2r.pdf
Télécharger