Numéro Spécial Mondes en Développement - ODD

date : 30.04.2024

Numéro Spécial Mondes en Développement
Thème : Les Objectifs du Développement Durable (ODD) : quel bilan d’étape ?
Dossier thématique coordonné par : Mehdi Abbas (MCF, Pacte-Cnrs), Stéphanie Treillet (MCF,
INSPE-UPEC, CEPN)
Appel à contributions
En septembre 2015, les 193 États membres de l’ONU ont adopté l’Agenda 2030 censé orienter les efforts
des États membres, des Organisations internationales, ainsi que des Organisations non gouvernementales
en matière de développement (Organisation des Nations unies, 2015). Ce programme universel porte une
vision de transformation de notre monde assurant sa transition écologique vers un développement durable,
d’ici 2030. Les 17 Objectifs de développement durable (ODD), et leurs 169 cibles sont le cœur de l’Agenda
2030. Ils couvrent l’intégralité des enjeux du développement durable : climat, biodiversité, énergie, eau, santé
mais aussi pauvreté, égalité de genres, prospérité économique, paix, agriculture, éducation… et sont
interdépendants les uns des autres.Depuis 2015, l’économie mondiale a connu des transformations radicales
liées à la crise de la COVID-19, à la guerre en Ukraine, à l’aggravation de l’altération écologique globale et
aux défaillances de la gouvernance multilatérale. Les Nations Unies, lors de la conférence de Stokholm+50
(juin 2022), n’hésitent pas à parler de « polycrise » pour qualifier l’état des rapports économiques et politiques
internationaux. Cette « polycrise » concerne l’ensemble de la communauté internationale, les mondes en
développement plus particulièrement et, bien entendu, l’agenda des Objectifs du développement durable.
D’où le constat établit lors du dernier sommet sur les ODD (septembre 2023) que seulement 15 % des
ODD ont été atteints à mi-parcours.
Compte tenu de ce nouveau contexte et aux termes de la deuxième phase (2020-2025) de leur mise en œuvre,
nous proposons un numéro spécial consacré aux apports et limites des ODD en matière de théories,
politiques et pratiques du développement international, en vue d’ouvrir une réflexion critique et constructive
sur l’agenda post-ODD.
Les ODD s’inscrivent dans la continuité des OMD, qui de 2000 à 2015 ont servi de référent à la
communauté du développement, tout en s’en différenciant. Ils revendiquent une visée transformatrice en
vue du développement durable opérant ainsi un recadrage et un élargissement de l’agenda du développement
international (Arora-Jonsson, 2023). Aux objectifs de développement humain liés à la pauvreté, à
l’alimentation, à la santé, à l’éducation et à l’égalité s’ajoutent des objectifs liés à l’économie et aux conditions
d’existence des populations : énergies propres et à coût abordable, travail décent et croissance économique,
industries, innovations, infrastructures, réductions des inégalités de revenu et d’accès, villes et communautés
durables. La dimension environnementale est déclinée en trois objectifs (lutte contre les changements
climatiques, vie terrestre et vie aquatique). À cela s’ajoute des objectifs de gouvernance, de paix et de sécurité
collective. L’architecture des ODD est complétée par le consensus d’Addis Abeba relatif au financement et
à l’aide publique au développement. La différenciation avec les OMD ressort également au niveau de
l’approche retenue. Les ODD se veulent globaux, et non pas réservés aux seuls pays en développement et
pays les moins avancés, universels et complémentaires les uns des autres, l’approche par cluster d’ODD et
non pas 17 ODD en silo est mise en avant.
Toutefois, dès leur mise en place les ODD ont été critiqués pour l’absence d’une réflexion réellement
nouvelle en matière de théories du développement, mais surtout relativement au concept même de
développement durable alors que des questionnements sur les limites planétaires et l’anthropocène ont été
formulés dans la phase préparatoire de l’agenda (Belmonte-Ureña et al., 2021). Il en va de même des rapports
de pouvoir et des asymétries entre acteurs du développement que les ODD consacreraient alors qu’ils se
réclament d’une visée transformatrice. De plus, leur adoption par les Nations unies, la nécessité de s’y référer
pour les acteurs du développement en quête de financements ne serait pas propice à l’émergence de pensées
alternatives et de pratiques innovantes (Briant Carant, 2017). L’approche par les cibles et les indicateurs avec
une méthodologie unifiée en vue de comparaisons internationales est certes importante, mais ce benchmarking
pourrait être préjudiciable au développement de méthodes et pratiques originales de développement, surtout
au niveau local ou communautaire (Gérardin, Dos Santos, & Gastineau, 2016). Cette approche par les
indicateurs, censés définir le problème de développement et juger de la pertinence des mesures prises, évacue
les déterminants sociaux, d’économie politique et les rapports de forces tant locaux, nationaux
qu’internationaux du problème à traiter ainsi que de la construction des indicateurs. Enfin, la question des
stratégies macro-économiques et macro-sociales de développement, déjà absente des OMD, semble rester
le grand impensé des ODD.
Aux deux-tiers du chemin et en vue de poser les premiers jalons d’une réflexion post-2030, il nous semble
opportun d’appeler analystes, praticiens ou académiques, à partager un bilan d’étape de leurs analyses,
expériences, pratiques et pensées des ODD. Sont encouragées les contributions thématiques,
pluridisciplinaires et s’appuyant sur des choix théoriques et méthodologiques pluralistes. Les contributions
attendues doivent porter sur les problématiques suivantes :
 Les ODD et les théories et stratégies de développement : les ODD sont-ils porteurs d’un nouveau
paradigme en matière de développement durable ? Quelles stratégies de développement sont sous-jacentes
aux ODD ? Quels sont les moteurs de la « transformation structurelle » pour le développement durable ?
Quelle place pour les ODD entre les différentes versions du consensus de Washington, par rapport au
paradigme de l’approche de la lutte contre la pauvreté de la Banque mondiale et du nouveau consensus de
Wall Street ? Aux deux-tiers de l’agenda, quel bilan tirer de la « gestion » du développement par les
indicateurs ? Quelle place pour les théories et approches critiques du développement dans un agenda
uniforme ?
 La gouvernance des ODD : comment s’opère l’appropriation par les acteurs du développement
(Administrations nationales, organisations internationales, ONG, praticiens du développement, etc.) de
l’agenda du développement durable ? Quels sont le sens et le contenu de « qualité des institutions » à
laquelle se réfère l’agenda des ODD ? Les ODD contribuent-ils à repenser la coopération (locale, globale)
en matière de développement ? La mise en œuvre des ODD a-t-telle donné lieu à des innovations
institutionnelles ou de gouvernance ? Les pays en développement et les PMA ne font-ils pas face à des
injonctions contradictoires – qui se manifestent notamment dans les évolutions de la doctrine et de la
pratique de l’aide internationale – à partir desquelles une stratégie de développement semble très difficile
à mettre en place ? En retour, peut-on considérer que la nécessité d’augmenter les ressources de l’aide pour
financer l’atteinte des ODD contribue à justifier l’évolution de celle-ci, en particulier l’appel à des fonds
privés ?
 L’Économie politique des ODD : Quels sont les conflits d’intérêts, de valeurs et de normes que révèlent
la mise en œuvre des ODD ? Inversement, la mise en œuvre des ODD a-t-elle été, est-elle, à l’origine de
conflits entre les acteurs du développement ? La mise en œuvre des ODD influence-t-elle les relations de
pouvoir entre les différentes parties prenantes ?L’évolution des rapports de puissance et de richesse au
niveau international a-t-elle eu des effets sur le contenu et les modalités de mise en œuvre des ODD et sur
les approches au sein des organisations et agences multilatérales et/ou régionales ?
Cet appel est ouvert à tout type de méthodes : réflexions théoriques, analyse macro, méso ou micro, études
de cas, production d’indicateurs, analyse statistiques, analyse comparative ou monographie etc…
Critères de sélection : pertinence thématique, pertinence du champ, originalité de la démarche, clarté de
l’argumentation, pertinence des résultats.
La contribution est soumise en fichier word par mail aux adresses suivantes :
Mehdi.abbas@univ-grenoble-alpes.fr ; stephanie.treillet@u-pec.fr en indiquant en objet « Numéro spécial
MEDODD »
Échéancier prévisionnel :
30 avril 2024 : envoi de la proposition de contribution (résumé)
31 mai 2024 : retour des décisions du comité éditorial
30 octobre 2024 : envoi des articles complets
30 janvier 2025 : envoi des rapports des évaluateurs
30 mai 2025 : envoi des articles révisés
30 octobre 2025 : date prévisionnelle de publi