In Memoriam


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Paul à Niakhar, le 29 octobre 2015. @L Fleury
Nous venons d'apprendre avec une immense tristesse le décès de notre collègue et ami Paul Senghor le vendredi 29 mars 2024.

Originaire de Mlomp, Paul a fait des études d'infirmiers et rejoint sa commune natale pour travailler au dispensaire Saint Joseph de Mlomp. Il y fut remarqué par les chercheurs de l'ORSTOM pour sa curiosité et son savoir faire médical dès les premières enquêtes conduites au milieu des années 1980. Paul choisit ensuite de quitter le dispensaire pour exercer à Dakar. Mais sa route allait bientôt recroiser celle de l'ORSTOM.

En effet, employé au Centre de Traumatologie et d’Orthopédie, il y soigne un employé de l'ORSTOM au début des années 1990. Venant rendre visite à son collègue, Jean-François Trape, paludologue, reconnaît Paul Senghor avec lequel il avait travaillé à Mlomp et lui propose du travail au laboratoire de paludologie. Après plusieurs années de travail à temps partiel en parallèle de ses activités d’infirmier, Paul Senghor est embauché en CDI à l’ORSTOM en 1995. Il effectue alors ses premières missions à Niakhar pour réaliser des gouttes épaisses - des prélèvements de sang qui une fois analysés au microscope permettent d’identifier la présence du parasite à l’origine du paludisme ainsi que ses caractéristiques.

Remarqué par Gilles Pison, ce dernier lui propose de participer aux entretiens d’autopsie verbale tout d’abord à Bandafassi, puis à Mlomp, son village d’origine, deux sites alors gérés par l'INED. Du fait de son talent pour réaliser ces entretiens, il devient très vite, à la fin des années 1990, l’un des enquêteurs principaux chargés des autopsies verbales. En 2008, à la réunion des trois sites sous la direction administrative de l'IRD, il se voit aussi chargé des autopsies verbales de Niakhar. Il s'impliquera également en tant qu'enquêteur du suivi démographique et sanitaire à Bandafassi et superviseur du suivi de Mlomp à partir de 2008. Il contribua à de nombreuses enquêtes sur la santé conduites par les unités URMITE, puis VITROME.

Au delà de son immense contribution à l'OPSE, Paul a contribué à initier de nombreux scientifiques, de l'INED et de l'IRD notamment, à l'histoire, aux traditions et aux beautés de la culture Diola et de la Casamance. Parler avec lui était toujours un immense plaisir et une source d'enrichissement extraordinaire. Homme de terrain dynamique, toujours de bonne humeur, généreux et empathique, Paul a illuminé de sa présence de nombreux terrains de recherche et a contribué à leur réussite. Il a su y imprimer les moments les plus plaisants et les plus magiques.

Paul avait pris sa retraite en 2021 et nous manquait déjà beaucoup. Il passait désormais beaucoup de temps en Casamance. Il y avait notamment mis en place un verger d'orangers dont il parlait avec passion, avec cette lueur dans le regard que nous n'oublierons pas.

Paul restera à jamais dans la mémoire de l'observatoire et dans les coeurs de ceux qui ont eu le bonheur de travailler avec lui.


Crédits : Ce texte exprime l'émotion de nombreux collègues, qui ont échangé mots et photos à l'annonce du décès de Paul. Il a été rédigé par Laurence Fleury.

Le texte a beaucoup emprunté à la biographie de Paul écrite par Ariane Sessego dans son mémoire de Master 2, « Les médecins de la mort. Identifier les causes de décès dans les pays les plus pauvres : la méthode d’autopsie verbale en Afrique de l’Ouest depuis les années 1950 » (2022).